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avril 2024
Cet hiver, une douceur exceptionnelle s’est installée, faisant fondre le manteau blanc bien avant les premiers signes printaniers habituels. Alors que nous observons un printemps prématurément hâtif pointer le bout de son nez, profitons de cette transition douce, mais rapide pour faire éclore notre édition printanière du Dispatch. Côté pub, côté communication et côté humain, voici ce qui vaut la peine d’être mentionné (à notre humble avis).
À 9 ans, j’écoutais l’Album du peuple de François Pérusse dans mon walkman jaune (heureusement à l’épreuve de l’eau), en pleurant de rire dans ma chambre tapissée d’affiches de Jonathan Taylor Thomas. Bien avant Pérusse, des piliers importants de l’humour, dont Dominique Michel, Yvon Deschamps, Claude Meunier et Michel Barrette, avaient déjà défriché la scène humoristique québécoise, qui est plus que jamais enracinée dans notre société d’aujourd’hui. On dirait que c’est dans notre ADN, d’aimer ça, rire. Je me suis demandé comment ça se fait.
Nous autres, les Québécois·es, on est reconnu·e·s (principalement au Canada anglais) pour notre fameuse « joie de vivre ». On accorde une grande importance à la convivialité et au plaisir, et l’humour est un moyen de renforcer les liens sociaux, de créer des moments rassembleurs. Il semble que l’humour soit ancré dans notre identité culturelle, linguistique et historique, et qu’il joue un rôle crucial dans notre tissu social et dans notre expression collective.
Au fil de son histoire, le peuple québécois a traversé plusieurs épisodes de lutte et de résistance, comme la Révolution tranquille, cette période des années 1960 marquée par des manifestations, des grèves et une montée du nationalisme québécois. Ces événements définissent notre peuple, et il en découle aujourd’hui une tradition de débats sociaux et politiques animés. L’humour est souvent utilisé de manière satirique pour commenter et critiquer lors de ces débats. Lorsqu’il est question de sujets sérieux, cette forme d’art permet de favoriser le dialogue, de repousser certaines limites et, donc, d’encourager le changement. C’est d’ailleurs pour cette raison que de nombreux humoristes québécois utilisent leur plateforme pour aborder des questions de société importantes, ou même pour jeter un œil critique sur l’actualité – pensons notamment au Bye Bye, à Infoman, au regretté Sol et aux Justiciers masqués.
Avec le temps, le Québec s’est bâti une solide réputation culturelle, surtout en humour, et a vu naître plusieurs figures emblématiques. Les Québécois·es cultivent un amour profond et grandissant pour leurs humoristes, qui sont ni plus ni moins de véritables célébrités. Pensons, par exemple, à Patrick Huard, un humoriste bien de mon temps qui, après avoir fait carrière comme stand up, est aujourd’hui comédien, animateur et même réalisateur. Ce n’est pas le seul artiste du domaine de l’humour qui a utilisé son art comme tremplin pour faire le saut en télévision et au cinéma. Bien des humoristes de la relève sont également très présents sur diverses plateformes, ce qui fait d’eux des personnalités publiques très visibles.
Je comprends mieux pourquoi l’humour est aussi profondément ancré dans notre patrimoine. C’est à la fois le reflet de notre histoire, une forme d’exutoire et de fierté; il joue un rôle crucial dans la construction de notre identité collective.
Par ailleurs, ne négligeons pas que c’est notre langue qui fait la force de notre humour, et qui lui confère sa saveur unique. C’est propre à chaque culture. La langue française est précieuse au Québec, c’est le fondement de notre identité culturelle. La richesse de notre vocabulaire permet des jeux de mots subtils, des doubles sens et des nuances qui font les choux gras des publicitaires, notamment.
L’humour, qu’il soit ironique ou absurde, ainsi que l’autodérision sont des terrains très fertiles en matière d’adaptation et de localisation publicitaire. En utilisant des références culturelles et un style d’humour qui résonnent avec le public, une pub peut être hyper efficace dans sa capacité à connecter avec les consommateurs et à susciter une réponse positive envers la marque. Au Québec, on est très réceptifs au contenu qui suscite des émotions et qui vient toucher notre corde sensible. Lorsqu’il est utilisé de manière stratégique, l’humour peut être un puissant moteur de succès pour une campagne publicitaire au Québec.
Émilie Maranda, Directrice culture et communications
Chaque fois que je me retrouve sur la plateforme Airbnb en quête d’hébergements pour un voyage, je finis toujours par me dire que de nos jours, tout a l’air pareil, peu importe où on se trouve dans le monde. Au-delà de la même déco minimaliste dans les apparts, on retrouve aussi les mêmes enseignes de la restauration et de la mode dans les métropoles, en Asie comme en Amérique. C’est d’ailleurs la thèse proposée par Ryan Duffy dans son article « Why Everything Looks the Same ». Cette tendance va au-delà du design d’intérieur ou urbain; pensons au contenu que l’on consomme, avec les séries télé qui semblent toutes suivre une formule préétablie ou encore, avec le « Hey guys, welcome back to my channel! » des influenceurs sur YouTube.
En marketing, c’est aussi criant : logos, typographies, esthétique de produits, et j’en passe… Tout est uniformisé pour être mis au goût des nouvelles générations au pouvoir d’achat dominant : les millénariaux et la génération Z. Et du point de vue des marques, ce n’est pas difficile de comprendre pourquoi.
Cet article prend un nouveau sens en 2024 avec la montée fulgurante de l’intelligence artificielle. Bien que celle-ci fasse les manchettes des médias marketing pour ses promesses de créativité débridée et de potentiel quasi infini, même des offensives percutantes et efficaces comme celle de Heinz par Rethink font ressortir l’une des failles actuelles de l’IA : sa propension à l’homogénéisation. Dans le cas de Heinz, c’est le génie de la campagne – en résumé, on a demandé à l’IA de générer une image d’une bouteille de ketchup; les résultats étaient tous inspirés du logo et de la forme emblématiques de la bouteille Heinz. Mais pensons à la campagne récente de Trivago, où une vingtaine d’acteurs ont été remplacés par un seul, avec l’assistance de l’intelligence artificielle. Auparavant, une campagne de Trivago était synonyme de vingt porte-parole et de trente-cinq productions. Maintenant, ce nombre se réduit à un. Encore une fois, on comprend que c’est tentant pour une marque avec une présence à l’international de vouloir simplifier ses productions en faisant une seule campagne à déployer dans tous les marchés.
L’envers de la médaille, toutefois, c’est que cette campagne a été plus ou moins bien reçue. Selon moi, à vouloir plaire à tout monde, on finit par ne plaire à personne (ou presque). Autrement dit, une marque qui veut rejoindre un (trop) grand public peut être tentée d’employer un archétype des plus communs. Y lire : un homme blanc d’âge moyen, agréable à voir, qui s’exprime dans un langage soigné, pas trop formel ni trop populaire, mais dénué de particularité linguistique. On dit donc adieu aux offensives conçues spécialement ou adaptées pour un marché ciblé, mettant de l’avant sa diversité socioculturelle ou son unicité. On cesse de s’adresser à des groupes précis, mais au final, personne ne se sent vraiment visé. Ironiquement, l’homogénéisation finit par avoir l’effet contraire de ce qu’elle vise : elle tend à exclure davantage qu'à inclure.
Quelle est la solution, donc, pour une marque qui veut se distinguer en 2024? Comme l’auteur de l’article sur Medium le suggère, la réponse à ce problème résiderait dans la différenciation. Osez l’originalité. Évitez la conformité. Votre marque sera beaucoup plus mémorable. Et j’ajouterais : parlez à votre marché. Si vous voulez avoir une présence au Québec, parlez aux Québécois·es. Misez sur les particularités sociolinguistiques et culturelles de la belle province. Chez TFS, c’est notre spécialité. Ça nous fera plaisir de vous accompagner.
Catherine Renaud, conceptrice-rédactrice
Avez-vous un abonnement à une plateforme de streaming? Sûrement. À deux ou trois plateformes? Peut-être. Avez-vous aussi un abonnement à votre gruau matinal, à votre crème de jour ou à votre fond de teint quotidien, à votre service d’autopartage, à votre appli fitness en direct de votre salon, à votre marque de vêtements préférée, à des boîtes-repas pour la semaine, à des kits de jouets éducatifs pour vos enfants, à votre vin nature? Tout ça, et bien plus, constitue le marché de l’abonnement en constante croissance. L’offre des marques est devenue illimitée. Et, au Québec, on n’échappe pas à cette mouvance dans les comportements de consommation. On prévoit que le marché de l’abonnement, qui représentait mondialement 200 milliards de dollars en 2021, pourrait atteindre 500 milliards de dollars en 2025, soit plus du double!
Mais qu’est-ce que cette tendance apporte aux marques et aux consommateurs? Du côté des marques, il est plus aisé de prévoir les effectifs et les matières premières lorsque les chiffres liés à la consommation sont déjà établis à moyen ou à long terme. Toutefois, outre les recettes mensuelles ou annuelles constantes, les comportements des consommateurs peuvent aussi être suivis et l’offre peut être ajustée et personnalisée en cours de route afin d’offrir une expérience bonifiée avec le temps, créant ce qu’on appelle des « boucles de rétroaction ». Ce modèle permet également aux marques de fidéliser leur clientèle, et ce, en ciblant les préférences de chaque personne en récoltant des données très spécifiques sur elle. Du côté des consommateurs, l’expérience personnalisée peut représenter un réel attrait, sans compter qu’ils n’ont plus à penser à leur consommation en mode « achat unique ». Leurs abonnements leur enlèvent le poids de la lourde tâche d’acheter leurs produits et services à la pièce et allègent ainsi leur charge mentale.
Mais est-ce toujours à l’avantage des consommateurs de préserver ces abonnements multiples? Les besoins évoluent avec le temps, et la situation économique aussi, ce qui nécessite parfois de se poser la question classique « En ai-je vraiment besoin? » Dans le contexte inflationniste actuel, les marques ont tout intérêt à ajuster leur offre et à rendre l’expérience des utilisateurs encore plus attrayante et accessible si elles veulent maintenir la relation à long terme avec eux. La concurrence se fera de plus en plus féroce au fil des années si la tendance se maintient, et on n’a pas fini de se faire offrir toutes sortes d’abonnements aussi inusités qu’innovateurs!
Émilie Choquet, conceptrice-rédactrice
Comme moi, des millions de téléspectateurs partout dans le monde ont les yeux rivés devant le Super Bowl chaque année, un événement sportif qui établit régulièrement de nouveaux records d’audience. Le Super Bowl, que j’aime surnommer le « Bye Bye américain », offre un spectacle grandiose mêlant publicités créatives, performances musicales et match de football. En 2024, le Super Bowl LVIII a attiré une moyenne de 123,7 millions de téléspectateurs, enregistrant ainsi la plus grande audience télévisée de tous les temps pour un événement diffusé sur une seule chaîne. Cet événement est souvent considéré comme un phénomène culturel aux États-Unis.
Du côté nord de la frontière, au Québec, c’est pourtant un autre rendez-vous télévisé qui rafle des records d’audience : le Bye Bye, une revue humoristique de fin d’année produite par Radio-Canada. Le Bye Bye représente bien plus qu’une simple émission de divertissement. Diffusé chaque année le 31 décembre au soir, le Bye Bye est une tradition profondément ancrée dans la culture québécoise, mêlant satire, humour et réflexion sur les événements marquants de l’année qui vient de se terminer.
Malgré son succès mondial, le Super Bowl ne parvient pas à rivaliser avec la place qu’occupe le Bye Bye au Québec. En effet, selon les chiffres de l’audimat, l’édition 2023 du Bye Bye a attiré plus de 4,5 millions de téléspectateurs, c’est-à-dire la moitié de la population du Québec. L’audience du Super Bowl représente à peu près le tiers de la population américaine.
The French Shop est donc très fière de sa présence au sein des publicités du Bye Bye depuis quatre ans. En s’intégrant à cette émission emblématique, la shop contribue à promouvoir et à préserver la richesse de notre culture québécoise.
Bien que le Super Bowl soit un événement mondial spectaculaire, le Bye Bye de Radio-Canada demeure mon rendez-vous télévisé incontournable au Québec. C’est bien plus qu’une simple émission de fin d’année; c’est un symbole de notre unité et de notre fierté québécoises, ancré dans notre tradition et célébré avec passion chaque année.
Lusenalto Andrade, Directeur artistique et Co-Directeur de création
La Saint-Valentin, quand on est célibataire, ça peut être un brin tristounet. Ce qui pourrait l’être encore plus, ce serait de la passer avec un couple d’ami·e·s… sauf quand Pizza Pizza décide de s’en mêler. En effet, toujours le cœur sur la main, Pizza Pizza a choisi d’offrir un généreux prix de consolation aux cœurs esseulés qui jouent toujours le rôle du chaperon : le 14 février, les célibataires pouvaient se présenter en restaurant pour obtenir une pizza moyenne gratuitement, à condition d’y amener un couple.
Notre agence partenaire Zulu Alpha Kilo, responsable de la création pour le compte de Pizza Pizza, nous a donc mandatés pour trouver une adaptation aussi futée qu’humoristique de son concept « Third Wheel Wheel Deal » pour le marché québécois. Pour TFS, le défi était aussi grand que savoureux pour rendre la majorité des éléments clés du nom en anglais, et ce, en seulement quelques mots : 1) l’idée de la personne célibataire de trop; 2) le chiffre trois; 3) l’offre promotionnelle ou 4) la pizza.
D’aucuns auraient sûrement le réflexe de traduire ça assez littéralement par « Offre de pizza pour les troisièmes roues ». D’emblée, la traduction littérale n’est généralement pas la piste privilégiée dans le cadre d’une adaptation pour un marché ciblé. Chaque langue foisonne d’expressions idiomatiques auxquelles ses locuteur·rice·s peuvent s’identifier; ce serait fou de ne pas en profiter pour leur parler de manière authentique et créative, tout en respectant l’esprit de la campagne en langue originale. Ceci étant dit, ce n’est jamais mauvais de partir de la traduction littérale pour explorer le territoire des possibles, si ce n’est que pour mieux s’en écarter! Si, en anglais, l’expression de la troisième roue (de quel véhicule, on se le demande) est communément répandue, en français, on parle plutôt de cinquième roue. De trois à cinq, on se doute déjà que cette option ne correspond pas au message principal, en plus de ne pas être très accrocheuse.
On a donc dit adieu au carrosse et à ses roues pour mieux élargir nos horizons : entre trouples, ménages à trois et les trois font la paire, le lexique de l’amour à trois en français regorge d’options, mais ce qui nous manquait, là-dedans, c’était le célibat. Parce qu’en cette Saint-Valentin, ce ne sont pas les personnes qui respirent l’amour qui étaient honorées, mais bien celles qui vivent de pizza… et d’eau fraîche.
Avec une shortlist comprenant des options comme le Coupon du chaperon et le Pizzage à trois, c’est finalement le Spécial célibatrois qui a séduit nos clients – et nous aussi, pour être honnêtes! Ce nom comprenant un mot-valise avait l’avantage d’être court, de combiner les notions de célibat et du chiffre trois, ainsi que l’élément promotionnel avec le mot « spécial ».
Encore une fois, on salue Pizza Pizza et Zulu Alpha Kilo pour l’originalité de leurs campagnes ciblées pour des occasions particulières. C’est toujours un plaisir pour nous de les third-wheeler. 😉
Catherine Renaud, Conceptrice-rédactrice