we speak
mai 2023
Bien que la chaleur tarde à se pointer ce printemps, le Québec en est à fleurir ses jardins, à planter ses potagers et à remplir ses bacs de terre. Certaines municipalités plus au nord attendent, mais une grande majorité de Québécois.e.s passent à la pépinière le long week-end de la Journée nationale des patriotes (fête de la Reine dans le ROC) pour faire le plein de vivaces, d’annuelles, de fines herbes et de semis de fruits et de légumes. Si vous êtes en train de faire la même chose, prenez une pause de désherbage pour faire un peu de lecture. Côté pub, côté communication et côté humain, voici ce qui vaut la peine d’être mentionné (à notre humble avis).
Je me baladais tranquillement sur une avenue Mont-Royal fermée à la circulation routière, légèrement hébétée par l’effervescence d’un long weekend de quatre jours, quand je remarquai quelque chose qui me surprit. Pas une, pas deux, mais bien quatre librairies indépendantes, côte à côte, se tenant même les coudes face à l’adversité des grands groupes. M’enfin, c’est l’image que ce bienheureux quatuor me renvoyait. J’ai trouvé ça beau, des p’tites librairies de quartier, où les voisins et voisines se rendent pour bouquiner, lancer leurs romans (ils s’en lancent beaucoup des romans sur le Plateau-Mont-Royal) ou lâcher lousse leurs enfants dans la section jeunesse pendant qu’ils savourent un café chaud acheté à la porte à côté (il y en a beaucoup des cafés sur le Plateau-Mont-Royal).
En me renseignant un peu, j’ai appris qu’il y avait environ 160 librairies indépendantes au Québec, à l’heure où s’écrivent ces lignes. Après une période de disette au début 2010, elles connaissent depuis une remontée assez impressionnante, merci, compte tenu du contexte actuel (Amazon et Internet pour ne pas les nommer). En huit ans, pas moins de 13 nouvelles librairies ont vu le jour, et 2021 a été une année record avec l’ouverture de huit librairies dans la province. Pas pire pantoute pour un média qui avait peur de disparaître avec l’avènement du livre numérique.
Mais comment David réussit-il à survivre face à Goliath? Grosso modo, les librairies indépendantes ont modifié leurs structures; les espaces sont plus petits, elles s’impliquent dans leur communauté et font même parfois une place à des fermes du coin ou des comptoirs à café à même leur boutique. Coude à coude dans l’adversité, disais-je donc.
Il n’y a pas que les librairies qui tirent leur épingle du jeu par chez nous, les bibliothèques aussi. Elles possèdent même leur propre plateforme de livres numériques, PRETNUMERIQUE.ca, qui nous donne accès à une tonne de livres, de livres audio et de magazines en français.
Pendant ce temps, in the rest of Canada
On me chuchote à l’oreille que ce n’est malheureusement pas le cas pour nos amis in the rest of Canada qui peinent à répondre aux besoins de leurs abonnés en matière de livres et de services numériques. Pourquoi ça? C’est d’abord et avant tout en raison des coûts exorbitants réclamés par les grands groupes d’édition américains qui empêchent les bibliothèques publiques hors Québec d’offrir un accès adéquat aux livres numériques et audio à leurs usagers. C’est que ces fameux « Big 5 » ne les vendent pas pour des pinottes leurs licences! Ils contrôlent en très grande partie l’édition grand public dans la langue de Shakespeare et vendent leurs propres licences de livres numériques aux bibliothèques de trois à quatre fois le prix réservé à monsieur-madame Tout-le-Monde, en plus d’imposer des limitations dans le temps et autres restrictions! De notre côté, ce qu’on remarque, encore et toujours, c’est cette solidarité si chère aux Québécois et Québécoises qui aiment et consomment leur culture. Cette amitié entre éditeurs et bibliothèques permet à celles-ci d’offrir un accès privilégié à notre répertoire parce que, comme le dirait Dany Laferrière, « un bon livre se retrouve toujours entre les mains d’un lecteur libre ».
- Valérie Forget, directrice de l’adaptation
Ce n’est pas d’hier qu’on entend parler des « deux solitudes ». Bien que les années référendaires soient déjà loin derrière nous, le manque de communication et l’éloignement culturel entre les Canadien.ne.s anglais.e.s et les Canadien.ne.s français.e.s relevés dans cette expression née dans les années 40 persistent encore aujourd’hui. Afin de nous assurer de toujours donner l’heure juste à nos partenaires, on suit bien sûr le sujet de près chez TFS. On observe d’ailleurs une évolution du phénomène des « deux solitudes » chez les jeunes générations. L’identité culturelle des Québécois.e.s devient plus nuancée et plus complexe.
Les Québécois.e.s, baignant dans un océan anglophone en Amérique du Nord, priorisent la langue et la culture française comme facteur clé de leur identité. Le sentiment d’appartenance au Canada a été, et est encore, plus difficile. Sans grande surprise, selon un récent sondage de l’Association d’études canadiennes (AES) mené au début de l’année 2023, l’attachement des anglophones envers le Canada est similaire à celui des francophones envers le Québec, et cette loyauté se maintient au fil des générations. On note cependant que les plus jeunes (18-24 ans) montrent moins d’intérêt envers les questions d’identité nationale.
Plusieurs vecteurs de changement font pression sur les deux solitudes et influencent son impact sur les jeunes générations du Québec, y compris la croissance du bilinguisme, des interactions, du multiculturalisme et des plateformes de communication. Sans compter que les jeunes Québécois.e.s et les Canadien.ne.s partagent souvent des valeurs communes, dont l’ouverture d’esprit, l’égalité, la diversité et la justice sociale. Ces valeurs transversales peuvent contribuer à créer des ponts et à réduire les divisions entre les deux communautés.
Par contre, toujours selon le sondage de l’AES, on confirme que la laïcité rallie de plus en plus de Québécois.e.s francophones et anglophones, mais que les francophones voient encore plus positivement (60 % vs 33 % chez nos amis anglophones) la neutralité de l’État envers toutes les religions (y compris la religion catholique) et ses manifestations/symboles.
Les francophones semblent toutefois appuyer moins l’idéologie du multiculturalisme que leurs comparses anglophones (61 % vs 76 % pour les anglos). Cependant, les positions adoptées par le peuple québécois paraissent aujourd’hui plus nuancées. Bien que plusieurs seraient portés à penser que l’un s’oppose à l’autre, on peut être en faveur du multiculturalisme, mais également appuyer la laïcité.
Finalement, même si les Canadien.ne.s francophones et anglophones se sont rapproché.e.s sur certains points au cours des dernières années/décennies, il demeure important de comprendre et de respecter les différences et la complexité du peuple québécois. Si on ne veut pas faire de faux pas, la localisation en publicité a, et aura toujours, sa place dans le marché du Québec pour tout annonceur cherchant à s’engager auprès de lui et faire sa marque.
Bianca Lacasse, directrice de comptes
Nous sommes au printemps 2020, en pleine pandémie. La plupart des secteurs de l’économie sont au ralenti et certaines entreprises savent même qu’elles ne pourront y survivre. Comme lors d’une crise économique proprement dite, la publicité devient l’un des premiers secteurs à subir les coupures dans les dépenses des entreprises, affectant ainsi directement les revenus des médias. Parallèlement, les annonceurs qui subsistent et qui profitent même des changements de comportement des consommateurs durant la pandémie se tournent vers des plateformes médias « éprouvées », le regard des dirigeants marketing étant plus que jamais obsédé par un ROI sans faille.
C’est dans ce contexte particulier, où les débats entourant l’importance de l’achat local, la stimulation de l’économie, la minimisation des pertes d’emplois, bref, notre pérennité, qu’est né en mai 2020 le Mouvement Média d’Ici (https://a2c.quebec/nouvelles/mouvementmediadici), initié par L’Association des agences de communication créative (A2C), et dont Jungle Média était l’un des précurseurs.
La migration des investissements publicitaires vers le numérique et ses grands joueurs mondiaux (Google, Meta, Amazon, etc.) datant de bien avant la pandémie, fut cependant mis au grand jour sous une tout autre lumière durant ces événements, le réflexe de ne se fier que sur ces plateformes étant devenu un automatisme pour bien des agences et annonceurs, bien entendu au détriment des médias locaux, amenuisant du même coup leur capacité à créer du contenu original et pertinent de manière récurrente et profitable. Selon les données d’IAB Canada, si 50 % des budgets média sont alloués aux achats médias numériques, 86 % de ces mêmes placements échappent aux médias d’ici, laissant un maigre 14 % à notre propre écosystème.
Le Mouvement prône ainsi une autoresponsabilisation de la part des agences, qui, adhérant à celui-ci et à son manifeste, de forcer une plus grande part de leurs investissements aux médias d’ici, qu’ils soient numériques ou traditionnels, mesurable via un simple indice visible de façon franche sur tous les plans média, celui-ci indiquant le pourcentage de leurs investissements auprès de ceux-ci. Encore, en date d’aujourd’hui, la grande majorité des plans média issus de chez Jungle Média mettent de l’avant ce principe, en utilisant cet indice, de un, mais aussi en prônant l’utilisation des médias locaux auprès de ceux-ci via une meilleure éducation et une plus grande sensibilisation sur le phénomène. Dans l’industrie en général, ce fut une prise de conscience simple, mais efficace, puisque déjà, la part des investissements en publicité numérique dans les médias locaux est passée de 14 % à 34 % entre les années 2020 et 2021. Le Mouvement s’était d’ailleurs fixé comme objectif de doubler cesdits investissements dans les trois premières années, atteignant le plateau des 200 millions de dollars.
Aujourd’hui, le plus grand défi du Mouvement reste encore cette propension naturelle des investisseurs à écarter volontairement ou non les médias locaux sur des bases convenues d’efficacité et de performance, négligeant au passage des aspects non négligeables en communication comme le sont l’engagement, l’appartenance et les liens naturels que peuvent entretenir annonceurs, médias et consommateurs. Ainsi, ce virage ne peut se faire sans le soutien et la volonté même des annonceurs de s’assurer de voir une répartition équitable de leurs investissements médias auprès des médias d’ici et de discuter ouvertement de cet enjeu avec leurs agences. Il en va de l’avenir de ces entreprises et de la survie de notre propre paysage médiatique, un écosystème francophone unique au monde de par sa situation géopolitique.
Marc Hamelin, Directeur média, Jungle
Voilà maintenant cinq ans que TFS a du fun à adapter les campagnes nationales des restaurants Tim Hortons pour le marché francophone du Québec. Que l’on annonce une nouvelle saveur de beigne ou que l’on sollicite la générosité des gens le Jour des camps, les occasions ne manquent pas pour notre client de toucher les cordes sensibles des Québécois.e.s, et c’est toujours avec beaucoup de plaisir et de professionnalisme que l’équipe ici s’attelle à la tâche.
La plus récente campagne faisant la promotion des fameuses cartes à collectionner de la LNH ne fait pas exception. Au fil des années, la marque a demandé à de nombreuses vedettes de hockey de participer à ses publicités, incluant plus récemment Sidney Crosby, Nate MacKinnon, Sarah Nurse et Marie-Philip Poulin. Sauf qu’en 2023, une saveur plus nostalgique est au menu : en effet, les cartes de cette année sont à l’effigie d’anciens joueurs et d’anciennes joueuses de la LNH et du hockey féminin.
TFS a donc été mandatée pour adapter en français la campagne publicitaire télévisuelle et numérique créée par l’agence torontoise GUT. Le défi était de taille puisque le concept anglophone mettait en vedette Wayne Gretzky et Hayley Wickenheiser. Certains se souviendront de la publicité de JOFA (1981), mettant en vedette un Wayne Gretzky qui parle français, et de la parodie de RBO qui s’en est suivie… Pour le marché du Québec, hors de question de tenter à nouveau l’expérience.
La solution? Recréer le même récit, mais avec une vedette du hockey bien de chez nous, dont le parcours professionnel résonnerait auprès du public québécois. Après que TFS ait recommandé quelques joueurs québécois pour la version française de la campagne, le choix du client s’est arrêté sur l’un des plus grands défenseurs de l’histoire de la LNH, le seul et unique… Raymond Bourque.
Question d’ajouter à l’authenticité et de joindre un maximum d’amateurs.trices de hockey de la province, l’équipe a fait appel au comédien aux mille et une voix, Alain Cadieux, pour réenregistrer une voix de commentateur en recréant l’ambiance et l’excitation d’un moment symbolique dans l’histoire du hockey. Le tout accompagné d’une voix hors champ enregistrée par nul autre que le journaliste sportif Alain Crête, collaborateur de longue date de TFS pour les publicités de Tim Hortons relatives au hockey.
À la recommandation de TFS, La Merveille fait une apparition dans les publicités destinées au marché francophone, et l’interaction entre Wayne Gretzky et Raymond Bourque rend l’histoire d’autant plus sympathique. Pour voir ces deux grandes légendes en action, c’est juste ici, ici et ici.
Les règles du hockey sont peut-être les mêmes ou presque partout dans le monde, mais pour toucher son public, il importe de localiser son message; et comme le prouve cette campagne de Tim Hortons, ça ne passe pas toujours uniquement par la langue de Molière.
Joëlle Fournier, v.-p. création, et Béatrice Réa, conceptrice-rédactrice